Alors que Geert Noels et quelques autres économistes aussi bien francophones que néerlandophones ont tenté d’attirer l’attention des politiques sur le déficit croissant d’entrepreneurs, dans un pays qui aurait plutôt tendance à les décourager objectivement, voici une nouvelle mesure qui risque de renforcer encore un peu cet état de fait.

Normalement, jusqu’ici, lorsqu’un actionnaire apporte à une société de l’argent (apport en numéraire) ou des actifs (apport en nature), il augmente le capital de cette société, mais il a bien entendu le droit, le jour où la société est mise en liquidation, de récupérer son apport, souvent issu de ses économies (pour le numéraire) ou d’achats effectués avec (pour les apports en nature).

Ça paraît assez logique, au point de tomber sous le sens. Pensez-vous ! Nous sommes au pays du surréalisme. Ne l’oublions pas…

Sur le plan fiscal, le capital dont il est question ci-avant est qualifié de « bon capital », en ce sens qu’il peut être remboursé à l’associé sans impôt.

La logique est simple : ce que l’associé a apporté, il peut le récupérer sans conséquence fiscale défavorable pour lui… pouvait.

Dans le cadre du récent accord budgétaire, le gouvernement, composé exclusivement de gens qui n’ont jamais dû convaincre qui que ce soit du prix de leurs prestations et qui n’ont jamais envoyé une facture de leur vie, entend en effet atténuer ce principe !?

Il souhaite effectivement introduire dans le Code (fiscal) une fiction fiscale (elle aussi) selon laquelle le remboursement du capital social s’impute, pour une partie (qui reste à préciser…), sur les éventuels bénéfices réservés.

En d’autres termes, la société n’est plus libre de décider d’imputer l’intégralité des montants remboursés sur son capital réellement libéré, une imputation proportionnelle sur les bénéfices réservés s’imposant à elle.

Dans la mesure de cette imputation, les montants payés à l’actionnaire seront qualifiés de dividendes distribués et soumis à l’impôt, « selon la situation de l’actionnaire »… intéressant aussi, ça, comme concept.

Si la société dispose de bénéfices réservés, le capital réellement libéré est donc « pris en otage », comme l’a relevé un fiscaliste : l’actionnaire souhaitant le récupérer, pour l’une ou autre raison, devra d’abord payer l’impôt sur une la partie des réserves taxées de l’entreprise.

Il s’agit d’une nouvelle donnée dont il faudra tenir compte : le capital apporté doit être limité au strict nécessaire à long terme.

A brève échéance, c’est-à-dire avant la fin de l’année 2017, on devrait voir le capital souscrit des sociétés diminuer alors que les avances de fonds, sous forme de prêts d’argent, devraient augmenter. C’était peut-être le but… Les banques, … qui sont créancières de l’état, dont on nous rebâche qu’elles ne peuvent pas faire faillite, elles, … c’est sûr que c’est un peu comme chez total : « on n’ira pas chez elles par hasard ».

Le trente juin, parallèlement à une Loi modifiant l’article 276 du Code des impôts sur les revenus 1992 en matière de l’imputation de la perception anticipée de la taxe sur l’épargne à long terme, l’Etat (belge, donc, pour ceux qui perdraient le fil) s’est doté d’une nouvelle Loi contre la fraude fiscale. Le 10 juillet, ce même état, qui perd 84% de ses procès fiscaux (source : ministère de la Justice – c’est dire si ses vaillants fonctionnaires appliquent la Loi) entendait, légalement, renforcer le rôle du service de conciliation fiscale (dont les travaux préparatoires à sa mise sur pied exposent, en toutes lettres qu’il est là pour convaincre le contribuable du bienfondé du point de vue de l’administration – sic – au moins, sur ce coup-là, on ne peut pas leur reprocher trop d’hypocrisie). Mon avis : l’état ferait mieux (i) d’être vertueux lui-même et (ii) d’encourager la vertu, il se simplifierait la vie et à nous aussi.

Cette semaine (ce lundi, dans le journal le soir), on pouvait lire que plus de 221 milliards belges avaient pris la route de paradis fiscaux, en 2016. Peut-être… Les paradis fiscaux n’ont de raison d’être que parce qu’il existe des enfers fiscaux et à partir du moment où, sous couvert de fiscalité, ce qu’on remet en cause, c’est ni plus ni moins que la propriété privée, il ne faut pas s’étonner : on finit toujours par récolter ce que l’on sème et si’ l’état investir sans cesse dans la misère en semant, parallèlement, des mesures décourageantes pour la vertu, il ne doit pas s’étonner de se vider par le haut.