Peu de gens lisent les rapports des banques centrales, et ce n’est manifestement pas trop le cas non plus des journalistes économiques, ce qui est plus inattendu.
Dans le dernier rapport de la Banque de France, on pourrait lire qu’elle a dû puiser dans ses réserves, ce qui n’était plus arrivé depuis au moins deux décennies.
Son problème est parallèle à celui des états occidentaux : pour eux, les dettes contractées entre 2017 (« quoiqu’il en coûte ») et 2022 (fin du Covid) l’ont été à zéro pourcent (0%), voire à taux négatif et, arrivant petit à petit à échéances, elles sont immanquablement remplacées par des dettes à trois pourcents (3%).
Les états les plus endettés sont donc étranglés: ainsi, cette année 2024, la France s’est retrouvée avec presque 50 milliards de charge liée à sa dette en plus. Vu qu’elle collecte 500 milliards d’impôts, ça fait 10% du budget de l’état et l’intégralité de ce qu’elle fait de mieux quand elle est en croissance (1,5% de son PIB) qui y passent.
Ces mêmes états aiment à raconter qu’ils déterminent les taux et qu’ils les fixent délibérément hauts pour « combattre l’inflation », alors que simplement quand une personne physique ou un état est plus endetté, ceux qui lui prêtent le font à un taux plus élevé, car le risque de défaut ou de problème est plus grand.
Les états sont en effet plus ou moins en mesure définir les taux, en tous cas là où les banques centrales ne sont pas indépendantes, mais encore faut-il pour cela que la majeure partie de leur dette soit dans les mains de leurs nationaux et que les économies de ceux-ci soient peu mobiles.
C’est de moins en moins le cas.
Dès lors qu’ils doivent se financer sur les marchés, prétendre que ce sont eux qui fixent les taux relève d’une logique de propagande, c’est-à-dire du mensonge, ou d’une méthode coué, qui a peu de chance de réussite.
Alors comment, me direz-vous, expliquer les taux zéro qui ont prévalu un temps ?
Ces taux s’expliquent d’une part en raison de la volonté des débiteurs de créer de la monnaie donc, de l’inflation, seul moyen pour rembourser un créancier en monnaie de singe, passé un certain seuil ; et, d’autre part, par le fait que les Chinois, qui sont en train de devenir nos principaux créanciers étrangers, contrairement à « nous », planifient sur 30, voire 50 ans et pas sur le trimestre ou la prochaine échéance électorale.
Les plus attentifs auront noté que si on crée plus de monnaie sans créer plus de richesse, on n’enrichit pas le pays pour autant. C’est pareil pour les diplômes: ce n’est pas parce qu’il y a beaucoup plus de gens qui réussissent au Bac que la société est devenue soudainement beaucoup plus intelligente: on a surtout dévalorisé ce diplôme. Pour la monnaie, c’est pareil. Si vous créez plus de monnaie sans créer plus de richesse, vous dévaluez la monnaie, donc vous créez cette inflation que vous prétendez combattre…
Mais revenons à la banque de France et au fait qu’elle a dû puiser dans ses réserves: pourquoi et en quoi cela vous concerne-t-il ?
La Banque de France est la banque des banques françaises : lorsque les banques commerciales françaises déposent de l’argent sur leurs comptes auprès de la banque de France, lesdits comptes sont rémunérés sur les taux « courts ».
Devant la hausse des taux d’intérêt « qui combat l’inflation », la Banque de France est donc prise en tenaille entre les dépôts des banques commerciales qu’elle doit mieux rémunérer aujourd’hui et ses « actifs », quasimment exclusivement des dettes d’état, actifs plombés par d’anciens titres achetés aux anciens taux, bien plus bas (les taux zéro, Cfr. Supra), qu’elle est obligée légalement de conserver.
Et voilà comment la banque de France se retrouve obligée de taper dans ses réserves pour rémunérer les dépôts des banques commerciales françaises (qui, elles, se mettent largement ce qu’elles reçoivent en poche : rarissimes sont celles qui font bénéficier leurs meilleurs clients de cette manne, même s’il y en a…).
Rien qu’en comprenant ce que je viens d’écrire, vous comprenez et en savez bien plus que la plupart des directeurs d’agences bancaires.
Là n’est pas uniquement mon propos et, il faut savoir que la Banque de France n’est pas la seule à subir cette situation pour le moins inconfortable, quoique prévue et annoncée de longue date par nombre d’économistes non subventionnés, mais aussi par la Cour des Comptes, sur les avis desquels tous les gouvernements successifs s’asseyent tranquillement depuis des lustres.
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