Légalement, en France comme dans beaucoup de pays, les syndicats ont réussi à obtenir un monopole légal sur le dépôt de préavis de grève. Ce léger privilège peut se discuter et, à mon avis, va se discuter.

Face à une décision individuelle de ne pas travailler, qui constituerait une faute vis-à-vis de l’employeur, on peut comprendre l’idée de réserver ce droit à un groupement plus ou moins règlementé. Toutefois, cela met les syndicats « officiels », ceux qui sont reconnus par l’État, en position de force et les rend incontournables… Normalement.

La grève qui a mis à l’arrêt 2 TGV sur 5 ce week-end de Noël en France a permis d’observer une nouveauté intéressante. Les « chefs de bord », c’est-à-dire les contrôleurs, se sentent à la fois lésés depuis de nombreuses années dans leurs revendications et dans la reconnaissance des spécificités de leurs métiers, et ce y compris par les syndicats. Ils se sont donc réunis via un groupe organisé sur Facebook et ce n’est qu’une fois que les syndicats officiels ont observé qu’il y aurait dans leurs rangs plus de 3.500 « décisions individuelles » d’arrêt de travail qu’ils ont cautionné le mouvement.

Ce n’est pas rien.

Après la disparition du Parti socialiste et du Parti républicain, héritiers du RPR et l’UDF, les deux partis qui se retrouvaient à tous les échelons de la société française et qu’on aurait pu croire absolument indéboulonnables jusqu’aux environs de 2010, sont devenus deux structures institutionnelles et étatiques de plus qui sont en voie d’obsolescence manifeste, dépassées par la capacité des peuples à disposer VRAIMENT d’eux-mêmes.

On n’est pas encore au niveau suisse, mais c’est une évolution de plus dont le sens me plaît beaucoup.

Pour la « petite histoire », notez que la direction de la SNCF s’est trouvée surprise et a concédé des mesures spécifiques aux contrôleurs : prime distinctive, promesse d’emploi, création d’une direction spécifique et amélioration du calcul des retraites, entre autres.

Il y a donc un maximum de chances que la démarche fasse des émules. La méthode de grève hors syndicats marque peut-être un tournant sociétal pour le moins important.